Ingénieur topographe océanographe à la retraire, Jacques Duclos est un bon connaisseur des travaux en
milieu maritime. Avec son ancienne société, ce Cagnois est intervenu sur le canal de Suez et sur l'aéroport de Nice.
Il était notamment présent lors de la catastrophe de 1979, qui a vu une partie de la plateforme s'effondrer en mer. Il réagit aux conséquences des dernières
tempêtes sur le littoral et à la solution australienne, pour protéger les plages.
Que pouvez-vous dire des fonds marins, entre Saint-Laurent et Antibes ?
Sur l'ensemble du littoral, entre Antibes et Villeneuve-Loubet, il y a une pente très forte. A 500 mètres de distance, nous tombons sur la ligne des 100 mètres de
profondeur. Autre caractéristique, il y a le courant Ligure, et un contre courant, qui mangent le littoral.
Vous avez constaté une érosion ?
J'habite dans la région depuis 40 ans et j'ai vu l'érosion. La mer gagne sur la terre, à peu près une vingtaine de centimètres par an. Suivant les secteurs, cela
peut-être un peu plus, ou un peu moins.
Est-ce que vous avez constaté une accélération de ce phénomène ?
Les tempêtes ne sont pas un phénomène nouveau. mais avant, les plages se rechargeaient en galets. Il était apporté par le fleuve Var. Mais à partir des années
cinquante des travaux ont été réalisés dans son lit et le long de ses berges. Le lit du Var a été étranglé, accélérant son débit. A son embouchure, le courant a creusé les fonds et les galets
partent plus au large. Surtout, il y en a moins. Ils sont arrêtés par les seuils construits dans le Var.
Le Var a une telle influence sur les plages de la baie ?
La modification du Var a eu des impacts sur le bord de mer.
La plage, entre Antibes et Villeneuve, disparaît. La route est régulièrement coupée. Est-ce qu'il y a des solutions pour les sauver de l'érosion ?
Il faudrait faire une protection pour sauver la route et la voie ferrée. En revanche, il faut faire un trait sur la plage.
Elle est condamnée ?
A terme, oui.
Pourquoi rien n'a été fait pour la protéger ?
Le coût de tels travaux serait très important. Et en plus, il y a le problème de la gestion du bord de mer. La mer et la plage appartiennent au domaine public maritime. La route appartient à la DDE (sa gestion est maintenant assurée par le département, ndlr). Et ils se renvoient la balle.
Et les élus, pourquoi ne se mobilisent-ils pas ?
Les décideurs n'ont pas pris conscience de ce phénomène : le long terme ne les intéresse pas.
Que pensez-vous de la méthode australienne - qui consiste à immerger des sacs de sable pour protéger les plages ?
Du sable ? Il n'y en a pas. Les matières à pomper au fond de l'eau troubleraient les fonds, ce qui porterait atteinte aux algues, aux posidonies notamment. Il y aurait une autre solution. Remplir les sacs avec des gravats de terrassement et utiliser le port de clapage de l'aéroport pour les mettre sur des bateaux.
D'où vient le sable, que l'on trouve le long des plages ?
Il viendrait de l'érosion de la plateforme de l'aéroport.
Propos Recueillis Par Frédéric Delmonte
